En 2023, l’INRS a publié les résultats de sa grande étude concernant la sinistralité et la performance économique des entreprises. Sa méthodologie économétrique et son évaluation sur près de 2 millions d’entreprises françaises de tous secteurs durant 15 ans font de cette étude la preuve tangible et scientifique à cette affirmation : oui, le taux d’accidents du travail d’une entreprise a un bien un lien étroit avec sa compétitivité.
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Les résultats de l’étude de l’INRS concernant la corrélation entre les taux d’accidents du travail et les performances des entreprises
Depuis les années 90, le sujet de la causalité entre sinistralité (accidents du travail) et perte de productivité d’une entreprise a alimenté un grand nombre d’études. L’INRS a souhaité aller plus loin en donnant à cette question une réponse scientifique qui croise les données de la CNAM en matière d’accidents du travail avec celles des liasses fiscales de l’INSEE (provenant de Ficus et Fare) de 2003 à 2017.
Les résultats de cette étude publiée en 2023 sont sans appel : « Une augmentation de 10 % de la fréquence d’accidents du travail (AT) diminue la productivité de l’entreprise de 0,12 % et son profit de 0,11 % au cours de la même année »*. L’effet est encore plus néfaste sur une entreprise de moins de vingt salariés qui, pour une augmentation de 10 % d’accidents du travail, voit sa productivité en baisse de 0,38 % et son profit en baisse de 0,24 %.
Néanmoins, les entreprises de plus de 150 salariés subissent elles aussi des pertes de productivité, sur plusieurs années bien souvent, notamment affectées par l’augmentation des cotisations sociales (la tarification individuelle) qui résultent de cette sinistralité élevée.
Peut-on imaginer ainsi que la baisse des accidents du travail en 2022 de 6,7 % mentionnée par le récent rapport de l’Assurance Maladie ait eu un effet bénéfique sur la productivité des entreprises ?
La santé au travail, le « capital humain », un des vecteurs de réussite de l’entreprise
Bien évidemment, ce lien de cause à effet entre accidents du travail et économie de l’entreprise ne prévaut absolument pas sur l’importance de l’humain, sur la nécessité que chaque salarié doit pouvoir travailler en toute sécurité.
De plus, cette réalité économique est liée à une réalité bien plus vaste où la prévention des risques professionnels peut être considérée comme un facteur de performance globale de l’entreprise, au même titre que l’innovation ou les enjeux écologiques. Car s’appuyer sur l’humain, sur le « capital humain », comme sur son bien-être au sein d’un collectif de travail, c’est s’appuyer sur des savoir-faire, des valeurs de cohésion et de partage, mais aussi sur un engagement durable vis-à-vis de l’entreprise.
La force d’une entreprise repose donc « sur le capital humain comprenant le savoir et les compétences des salariés, le capital structurel incluant le collectif de travail et le procédé de production et le capital relationnel incluant la perception de l’entreprise par ses actionnaires, les perceptions des clients, fournisseurs et concurrents. »**.
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* INRS : Un lien établi entre sinistralité et performance économique de l’entreprise. [Recherche]
** INRS : Hygiène et sécurité au travail, septembre 2016, n°244, p. 102-107